L’immeuble du Gouvernement dit «Intelligent» n’aurait rien d’intelligent
Vu de l’extérieur, il a beau être sympathique même si les plaques de marbre se détachent jour après jour du mur, l’immeuble du gouvernement central, boulevard du 30-Juin, est en réalité une bien modeste bâtisse face aux immeubles que construisent des gouvernements provinciaux ayant plus d’ambition, ex-katangais, notamment dans le Haut-Katanga et dans le Lualaba.
L’immeuble Augustin Matata Ponyo Mapon-Justin Kaluma Muana Ngongo avait pourtant été baptisé «Intelligent», le jour de son inauguration mi-juillet 2015 sans l’être nullement, selon une enquête de la Fondation Entreprendre de Al Kitenge.
«L’intelligence faisant appel à l’innovation technologique du bâtiment est quasi-inexistante. (…) Aucune donnée n’est automatiquement collectée. Tout ou presque est manuel (…), éclairage, identification, circulation au parking, etc.»
MINISTRES GROGGY.
Il n’y a pas non plus d’ascenseur qui fonctionne.
Peu après l’arrivée à l’Hôtel du Conseil, mi-mai 2018, de Bruno Tshibala Nzenzhe, le BCECO, le Bureau central de coordination des projets, annonce l’attribution à l’entreprise chinoise Pan China Construction Group Company, d’un marché relatif au fret aérien pour vingt-huit ascenseurs à fournir et à installer dans des immeubles pour 1,3 million de US$ (1.356.428 US$). Le marché conclu avec l’aval du Premier ministre, précise le BCECO. Mais le BCECO n’avance ni date ni de l’arrivée des vingt-huit ascenseurs ni le début des travaux d’installation. Pas d’indication non plus sur la durée des travaux. Plus de deux ans après, leurs Excellences sont toujours contraintes d’escalader les marches pour atteindre leurs cabinets.
«J’ai vu un ministre reprendre haleine, les yeux hagards. Ce sera comme ça tous les jours, a-t-il marmotté», confie, un journaliste attaché de presse de «Son Excellence».
Il y a quatre ans, un mensonge d’Etat avait circulé selon lequel une dizaine d’ascenseurs sur les vingt-huit commandés par le gouvernement avaient déjà été posés par la Pan China Construction Group Company Limited.
UNE ESCROQUERIE…D’ETAT.
Certes, la société chinoise avait été sélectionnée par l’alors ministre des Infrastructures et Travaux publics, Fridolin Kasweshi Musoka, en avril 2015, par le biais du même BCECO pour fournir et installer vingt-huit ascenseurs à raison de quatre par immeuble. Mais Pan China n’a jamais rien entrepris.
Pourtant, le DG du BCECO, Matondo Mbungu, avait attribué le marché dont question à Pan China pour un montant de plus de 3.5 millions de US$ (nettement 3.502.368,19 US$). Mais peu après, le même Matondo Mbungu introduit un avenant au marché déjà attribué. La DGCMP, la Direction générale du contrôle des marchés publics, n’y voit aucun inconvénient et accorde un avis de non-objection à la démarche du BCECO.
Le 4 novembre 2015, Matondo Mbungu attribue, de nouveau, le marché de 28 ascenseurs à Pan China Construction mais uniquement l’avenant n°1 pour un montant de 345.711,54 US$.
Selon nos sources, le gouvernement n’aurait versé que quelque 100.000 US$.
La firme chinoise n’aurait guère apprécié l’attitude du gouvernement et a gelé, par conséquent, la mise en service des ascenseurs qu’elle avait déjà importés. Quid des 1.356.428 US$ «versés» par la suite à Pan China du temps de Tshibala? Sans doute que l’IGF, l’Inspection générale des Finances de Jules Alingete Key ou l’APLC, l’Agence de prévention et de lutte contre la corruption bien que celle-ci en peine avec le «mapage» vendredi 18 décembre de son coordonnateur Ghislain Kikangala, pourraient faire la lumière sur la destination de ces différents fonds.
Dans l’entre-temps, le BCECO et la Cellule de gestion des immeubles du gouvernement, un service d’Etat créé de bric et de broc du temps de Matata, s’emploient, comme par désinvolture, à créer et à attribuer de petits marchés du genre, soigner la pelouse, essuyer tel ou tel immeuble, à coup des dizaines des milliers de US$ à des établissements amis, en guise de récompense.
POLD LEVY NAWEJA.