La communication par phonie survit au grand bonheur des agents de la DGRAD qui s’en font les poches pleines
Certes, la très célèbre phonie Tshimlay, dans le quartier coupe-gorge de Matonge, a fermé, tout comme ses concurrents dont la phonie de l’avenue Ikelemba devenue aussi célèbre suite aux chamailleries catégorie X, en fait interdites au moins de 18 ans, auxquelles se livraient, chaque samedi après-midi, deux femmes d’un diamantifère, l’une à Lunda, en Angola, et l’autre dans la Capitale.
Réglé irrémédiablement en mode «main libre», en fait, point de secret, la communication crève le décibel, se propage dans tous les sens en écho, la phonie a vécu. Elle a plutôt survécu en RDC.
La téléphonie cellulaire, l’Internet et ses appendices des réseaux sociaux auront expédié la phonie dans des oubliettes des télécoms, croirait-on. Et pourtant, des agents de l’état commis à la parafiscalité (DGRAD) savaient qu’il existait encore des poches de résistance face aux NTIC et qu’il y avait lieu de supplanter le Trésor public en récupérant les recettes de la taxe d’exploitation de la phonie.
Sur papier, la DGRAD et le ministère des PT&NTIC ont désactivé, depuis quelques années, la taxe sur l’autorisation d’exploitation des chaînes de radiodiffusion sonore commerciale appelée communément phonie à usage public. Plus de prévision des recettes donc, la phonie étant devenue une technologie éculée, tombée en désuétude et évincée par le GSM et l’internet. Que faux !
RECOURIR A LA VIEILLE PHONIE?
Par ce temps où le régime des intouchables perd de terrain, l’IGF, l’Inspection générale des finances a les coudées franches pour investiguer sans aucune restriction, la DGRAD expédie au Trésor même les recettes non prévues. Le Trésor a, en effet, encaissé près de 45 millions de CDF soit environ 25.000 US$ en 2019, et plus de 121 millions de nos francs, un peu plus de 60.000 US$, à fin juin 2020, sur l’usage de la phonie publique. Mais, revers de la médaille, ces recettes, sans doute rabiotées, des phonies publiques prouvent à suffisance que la RDC demeure encore dans le bidonville de la cité numérique mondiale, plus de 30 ans après son ouverture publique aux NTIC.
Il y a encore des pans entiers du pays qui sont restés à l’époque d’avant-phonie. Il y a quatre ans, début 2017, à la faveur des pourparlers entre le gouvernement et des leaders du mouvement subversif Kamwina Nsapu dans le pays kasaïen, une délégation des chefs coutumiers, accompagnée des journalistes venus notamment de la Capitale, partie en croisade de pacification, arrive dans une contrée perdue du Kasaï central profond. Le chef du village ameute ses sujets après avoir appris que le Maréchal Mobutu a été chassé du pouvoir, il y a vingt ans, et qu’il était déjà mort.
Ce journaliste de la RTNC conclue que la contrée ignore donc tout de la CéNI, enrôlement, bureau de vote… et d’ajouter «nous sommes peut-être plus nombreux que les Chinois. Qui sait!». Autre anecdote, rapportée par la radio onusienne Okapi. à quelques encablures de Kalima, au cœur de la province de Maniema, un autre village s’est retrouvé totalement isolé parce que l’unique source d’informations, le poste radio du chef coutumier lui a été ravi par un Nsoko Muntu, gorille en patois local. La fracture numérique est le principal handicap de l’enseignement en ligne que propose le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique, Willy Bakonga Wilima, face à la recrudescence du Covid-19. Un élu de Bulungu, par exemple, a laissé entendre que la contrée ne compte qu’une seule antenne – elle serait de Vodacom – qui ne peut aller au-delà de 10 km. Devrait-on recourir à la vieille phonie?