Kadima ou personne

Kadima ou personne

Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a, vendredi 22 octobre, dans une allocution annoncée à la toute dernière minute, fait part de sa décision « de signer l’ordonnance désignant les membres du nouveau Bureau de la CÉNI », la Centrale électorale nationale indépendante.

Puis, aussitôt, dans cette allocution de 7 minutes, il a « exhorté vivement ces derniers à œuvrer pour organiser des élections libres, démocratiques et transparentes dans les délais constitutionnels », exprimant «son espoir que les trois délégués de l’opposition seront bientôt désignés pour rejoindre cette équipe et prendre toute leur place dans ce processus qui nous concerne tous, Congolaises et Congolais ».

PLUS DESORMAIS DE TEMPS A PERDRE.

L’ordonnance présidentielle signée peu avant cette allocution diffusée en direct dans le journal de 20:00’ de la Rtnc, la télévision nationale, a été immédiatement lue par la porte-parole adjointe du Président de la République, Mme Tina Salama.

Signe que Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo n’a plus désormais de temps à perdre…

Dans son allocution, il n’a pas manqué d’arguments. Il a d’abord rappelé le rôle que joue, «depuis les accords de Sun City – les textes fondamentaux signés dans la cité sud-africaine qui réunit en 2006 la classe politique congolaise, ndlr – les confessions religieuses ».

Elles «ont la lourde tâche d’accompagner les processus électoraux dans notre pays, notamment par la désignation, entre autres, du Président de la Commission Électorale Nationale Indépendante, institution citoyenne appelée à organiser les élections en RDC ».

Puis : « Point n’est besoin de rappeler ici et maintenant que la tenue de bonnes élections est un des fondamentaux pour une paix sociale durable et une stabilité politique, gages de l’attrait d’investissement et de la croissance économique ».

Et d’expliquer son refus d’investir en 2020, Ronsard Malonda Ngimbi, «candidat président de la CÉNI désigné ».

Il donne les raisons, trois au total : « La question de l’entérinement des membres du Bureau de la CÉNI n’était pas inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ; un seul PV désignant le président de la CÉNI, du reste sans soubassement, m’avait été transmis pour promulgation alors que le Bureau de la CÉNI devait compter 13 membres ; le Président et le Vice-Président de la plate-forme des confessions religieuses n’avaient pas sanctionné le PV de désignation par leurs signatures, et deux des représentants des six confessions religieuses supposés avoir soutenu le candidat président désigné en 2020 ont été désavoués par leur hiérarchie entachant ainsi la régularité de ce processus de désignation ».

« Face à cette situation et en ma qualité de garant de la bonne marche des institutions, j’avais demandé la reprise du processus de désignation en recommandant que le consensus soit privilégié».

« UNE MAJORITE CLAIRE DEGAGEE ».

Puis, de se réjouir «aujourd’hui que le processus de désignation des membres du Bureau de la CÉNI de 2021 se soit déroulé de manière régulière car, en ce qui concerne notamment la désignation du Président de la CÉNI, malgré le manque de consensus, une majorité claire s’est dégagée au profit d’un candidat, et ce, conformément aux prescrits de la Charte de la plate-forme des confessions religieuses. De plus, non seulement l’entérinement des membres du Bureau de la CÉNI a été régulièrement inscrit à l’ordre du jour de la plénière de l’Assemblée nationale, mais aussi 12 PV sur 15 attendus ont bien été reçus, examinés et entérinés par la Chambre basse permettant ainsi au Bureau d’atteindre le quorum requis pour pouvoir siéger valablement. Ce qui n’était pas le cas en 2020 ».

Il félicite ensuite «le Président de l’Assemblée nationale, pour avoir donné plusieurs occasions aux confessions religieuses, membres de la plate-forme, de se retrouver afin dégager un compromis, à défaut d’un consensus ».

Sans résultat néanmoins…

« LA DEMOCRATIE COMPETITIVE».

Le Président de la République en vient à la conclusion, en passant par la pédagogie.

«Notre pays a résolument opté pour la démocratie compétitive. Celle-ci a ses règles qui veulent que l’on ait des gagnants et des perdants. Nous ne pouvons pas, après avoir choisi la compétition et les règles y afférentes, nous en soustraire. Nos divergences, loin d’être des faiblesses, sont plutôt l’illustration de notre vitalité démocratique. Au regard de tout ce qui précède, j’ai décidé de signer l’ordonnance désignant les membres du nouveau Bureau de la CÉNI. J’exhorte vivement ces derniers à œuvrer pour organiser des élections libres, démocratiques et transparentes dans les délais constitutionnels. Par ailleurs, nous avons bon espoir que les trois délégués de l’opposition seront bientôt désignés pour rejoindre cette équipe et prendre toute leur place dans ce processus qui nous concerne tous, Congolaises et Congolais ».

Puis, enfin : « J’invite d’ores et déjà les organisations nationales et la Communauté internationale, à travers ses missions d’observation, à nous accompagner afin de garantir la tenue des élections crédibles en 2023. Pour ma part, je compte désigner rapidement, auprès de moi, un responsable du suivi du bon déroulement du processus électoral. À présent que le décor est planté, j’exhorte toute la nation congolaise à se mobiliser et à s’approprier ce processus en vue de la réussite des échéances électorales de 2023. Que Dieu bénisse la République Démocratique du Congo ».

Au fait, face à mille agendas des uns et des autres, Félix Tshisekedi avait-il le choix ?

Dans un article en couverture – « Denis Kadima, ça passe ou ça casse » (Le Soft International, n°1533, daté de mercredi 1er septembre 2021) – paru en plein tourment de ce processus – ce journal l’avait annoncé.

Un extrait : « Que va faire l’Assemblée nationale désormais que les deux présidents des Chambres, Christophe Mboso Nkodia Pwanga de la Chambre basse et Modeste Bahati Lukwebo de la Chambre haute, semblent avoir harmonisé leurs positions ? Qui ne sait que jamais l’Église catholique n’a, à ce jour, adoubé un seul candidat Président de la CÉNI, qu’elle s’est toujours opposée à tous les candidats ? Nul doute que ça passe ou ça casse ! »

TheBestSoft en pages 3 et 4, ci-après.

T.MATOTU

Denis Kadima, ça passe ou ça casse

(Le Soft International, n°1533, daté de mercredi 1er septembre 2021).

Il s’appelle Denis Kadima Kazadi. Congolais, né le 21 septembre 1961 au Congo. Détenteur d’un master en Sciences Po, diplômé post-universitaire en Administration des affaires de l’Université de Witwatersrand à Johannesburg (1997 et 1999).

Connu, reconnu comme expert en élections, démocratie et bonne gouvernance. Il compte trente ans d’expérience professionnelle dont vingt-et-un dans le domaine des élections, de la démocratie et de la bonne gouvernance…

PROCHE DU POUVOIR

Selon ses biographes, Kadima développe « des compétences solides dans les domaines du leadership, de la planification stratégique, de la conception et de la direction des programmes, de la levée de fonds (fundraising), de la gestion axée sur les résultats, du réseautage, de la gestion des ressources humaines et de la gestion financière ».

De 1987 à 1992, il est chef de service et gérant d’une succursale de la Banque Commerciale Zaïroise (ex-BCDC), dirige, de 1995 à 1998, en Afrique du Sud, le Programme de l’Ashoka Innovateurs pour le Public. De juillet 2010 à mars 2011, il est directeur du référendum et élections de l’ONU au Soudan et, en 2011, en Tunisie, il est conseiller technique principal du PNUD. Dans ce dernier pays, il est celui qui met en place et dirige  l’équipe électorale de l’ONU, élabore des stratégies et plans opérationnels appropriés pour l’organe tunisien de gestion électorale (ISIE) et intègre la dimension genre dans toutes les stratégies opérationnelles.

Il parle anglais, français, Swahili, Lingala, Tshiluba.

Présenté par la religion kimbanguiste, l’une des confessions religieuses du pays, membre de la plate-forme des huit confessions religieuses en charge de désigner le président de la CÉNI, la Commission électorale nationale, appuyé par cinq autres de ces confessions religieuses, six sur les huit admises à la désignation du candidat Président de la CÉNI, Kadima était bien parti pour gagner la partie.

Sauf que les choses traînent trop longtemps. Deux de ces confessions religieuses, l’église catholique représentée par la CÉNCO, Conférence Épiscopale Nationale du Congo et l’Église protestante représentée par l’ÉCC, Église du Christ au Congo, qui forment le présidium de cette sous-composante Confessions religieuses, opposent un refus catégorique au choix des six autres, les Kimbanguistes, l’Église du Réveil, les Musulmans, etc., invoquant « pressions, menaces exercées sur le choix par des milieux proches du pouvoir, appels téléphoniques anonymes, tentatives de corruption », ce qui remettrait en cause l’indépendance de ce candidat.

Catholiques et Protestante invoquent leur taille dans le pays, imposé leur veto sur le nom de Kadima. Sauf que, outre la charte de ces confessions religieuses, qui n’accorde à chacune qu’une voix, l’argument d’indépendance est difficile à tenir.

CANDIDAT PRESIDEBT CATHO ?

A supposer qu’un candidat soit proche du pouvoir, qui ne serait pas proche de qui ? Même si on désignait un prêtre catholique, qui ne connaît le sort du premier président de la CÉni, l’abbé Apollinaire Malumalu Muholongu, issu des catholiques, rejeté par la CÉNCO dès 2006 à sa désignation au dialogue inter-congolais de Sun Ciy, soupçonné d’accointances politiques pro-Kabila ! Qui ignore le cas du pasteur méthodiste Daniel Ngoyi Mulunda-Nyanga qui, en février 2011, connut le même destin ? Qui ne sait qu’aujourd’hui, l’Église catholique a un candidat officiellement présenté, Cyrille Eboloko, responsable du Programme d’Éducation Civique et Électorale à la Commission épiscopale Justice et paix, donc, à la CÉNCO ? Porté par la CÉNCO, Eboloko fut la cheville ouvrière de la cellule d’observation électorale de l’épiscopat catholique qui avait déployé en 2018 environ 4.000 témoins dans les bureaux de vote. Faut-il croire que la CÉNCO et l’ÉCC ont un candidat Président de la République et, du coup, pour ce faire, un candidat président de la CÉni ? Si tel est le cas et si ceci est connu, comment peuvent-elles espérer gagner cette partie ? En mobilisant la rue ? Ce serait fort dommage…

Que faire de la loi de la démocratie qui donne le pouvoir à la majorité exprimée ?

Il reste que malgré plusieurs tentatives de trouver un consensus, celui-ci est resté introuvable et la question s’est retrouvée à l’Assemblée nationale qui doit se prononcer après qu’une commission paritaire, elle-même contestée par diverses forces politiques, eut déposé son rapport.

Nul doute que ça passe ou ça casse !

Que va faire l’Assemblée nationale désormais que les deux présidents des Chambres, Christophe Mboso Nkodia Pwanga de la Chambre basse et Modeste Bahati Lukwebo de la Chambre haute, semblent avoir harmonisé leurs positions ? Qui ne sait que jamais l’Église catholique n’a jamais, à ce jour, adoubé un seul candidat Président de la CÉNI, qu’elle s’est toujours opposée à tous les candidats ? 

Nul doute que ça passe ou ça casse !

Il faut plus que jamais éviter de rééditer l’exploit Ronsard Malonda Ngimbi. Secrétaire Exécutif National de la CÉNI, désigné par six des confessions religieuses, porté par l’ex-majorité présidentielle kabiliste, ce furent les deux Églises – catholique et protestante – rejointes certes par la rue, et pas sans raison – qui s’opposèrent farouchement à ce candidat qui n’eut aucune chance après que l’Église kimbanguiste dont il disait être le candidat, eut déclaré qu’il n’avait jamais été porté par elle.

Accusé de tous les péchés d’Israël notamment d’avoir « trop mal » organisé les dernières élections surtout législatives – les dernières opérations électorales n’avaient pu aller à leur terme, le président de la CÉNI ayant stoppé le processus de comptage publiant les résultats qu’elle-même savait, communiqués par les tenants du pouvoir d’alors – mais voilà qu’on trouve comme successeur à Corneille Nangaa Yobeluo, son propre Secrétaire Exécutif National, l’homme qui fut en première ligne dans les tripatouillages de novembre 2018.

« Avoir ce Monsieur que je respecte par ailleurs et dont je reconnais le professionnalisme, la technicité, etc., l’avoir à la tête de la CÉNI, c’est la continuité de l’ancienne CÉNI. Est-ce que les Congolais accepteraient cela ? L’enjeu est de taille. Il s’agit de redonner la confiance du peuple congolais au système électoral. Si on doit aller aux élections avec la CÉNI Nangaa-bis, il y aura peu de Congolais qui se mettront debout pour aller voter», avait expliqué le Secrétaire général de la CÉNCO, l’abbé Donatien Nshole Babula, la parole de la Conférence Épiscopale.

Puis : «Il y a eu blocage parce que chacun tenait à son candidat. Les autres ont fait bloc pour soutenir la candidature de Malonda. Pour l’ÉCC et la CÉNCO, c’est tout sauf ça. Ça doit être clair. Cela parce que c’est lui le secrétaire exécutif de la CÉNI qui nous a conduit aux dernières élections. C’est lui la cheville ouvrière du point de vue technique. C’est lui le technicien qui a combiné tout ce que nous avons déploré aux élections de 2019 ».

« Ce pays va décoller le jour où ceux qui sont au pouvoir vont comprendre que pour rester au pouvoir, ils doivent travailler de sorte à satisfaire la population. Si ça continue comme aujourd’hui, avec ceux qui pensent que pour rester au pouvoir, il faut des combines avec la complicité de la CÉNI, le peuple congolais continuera dans la souffrance (…). La CÉNCO et l’ÉCC disent non à une CÉNI qui sera la continuité de Nangaa ».

ALUNGA MBUWA.

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