Comment furent les trois premières années passées de Tshisekedi
Si c’est à l’Histoire, avec le recul que son jugement permet, d’établir ce qu’auront été les trois premières années du Régime Tshisekedi, cela n’empêche pas de jeter un regard sur ce début de gouvernance et tenter d’en tirer les premiers renseignements.
D’abord, clairement ce constat : peut-on s’empêcher, après avoir applaudi une incroyable passation de pouvoir pacifique – la première de l’Histoire du pays depuis son accession à l’indépendance – de noter le gâchis qui s’en est suivi, à savoir, la coalition FCC-CACH !
TOUT ETAIT CALCULS.
On l’avait qualifié de coalition. Ce fut une cohabitation entre deux coalitions politiques, deux visions que tout dans le passé avait opposé.
Le 27 janvier, dans une déclaration officielle, les Sénateurs membres de l’Union Sacrée de la Nation, ont «déploré» cette coalition, qualifiant une période de deux ans, «d’années perdues dans une coalition improductive CACH et FCC».
Tout était calculs. Si, dans la nuit du 9 au 10 janvier 2019, les FCC avaient concédé la défaite à la présidentielle en acceptant la proclamation officielle des résultats de la Commission électorale nationale indépendante – Félix Tshisekedi ayant récolté 38,57% des suffrages, Martin Fayulu 34,8 %, Emmanuel Ramazani Shadary, le dauphin du pouvoir sortant 23,8 % à cette élection à un tour – ils s’étaient réservés le meilleur : une razzia hors-normes aux Législatives nationales avec plus de 300 Députés et provinciales proclamée quand dans certaines provinces, les bulletins de vote n’avaient pas été dépouillés. Même razzia aux bureaux de toutes les Chambres comme à l’élection des gouverneurs avec 16 gouverneurs PPRD-FCC actés sur 26 que compte le pays.
LE MAL ETAIT FAIT.
Convaincus que Tshisekedi serait l’homme en charge d’inaugurer les chrysanthèmes, les PPRD-FCC s’étaient laissés convaincre qu’ils se réserveraient la réalité du pouvoir : Premier ministre, ministères et postes clé (Finances, Justice, Banque Centrale, Gécamines, pouvoir judiciaire, Services de sécurité, armée, police, etc.), les plus grosses entreprises outre les deux Chambres.
Jamais, le nouveau Président de la République n’avait pu avoir la moindre liberté dans les nominations ou les sanctions, celles-ci dépendant du gouvernement et, donc, du chef du Gouvernement étroitement dépendant de l’ancien parti présidentiel, le PPRD, membre dirigeant du regroupement FCC, le Front Commun pour le Congo.
Il est clair que tout avait été mis en place pour ouvrir la voie de l’échec au président Tshisekedi et préparer le retour en grande pompe du PPRD-FCC.
On comprend pourquoi des nominations signées le 3 juin 2019 à la tête d’entreprises, dont la SNCC et la Gécamines, ne furent jamais exécutées, plusieurs mois plus tard, retoquées par un ministre PPRD-FCC instruit par son parti qui lui a demandé « très clairement de bloquer ces nominations en refusant de notifier les intéressés». Ces ordonnances auraient dû « être débattues en conseil des ministres », et n’auraient jamais dû «être contresignées par un Premier ministre démissionnaire », avaient expliqué des porte-parole de l’ex-parti présidentiel. Si un nouveau Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba avait été désigné, il peinait à former un gouvernement, et n’avait pas encore été investi par le Parlement.
C’est le Parlement qui, le premier, mit le feu à cette «coalition». Un député, Charles Nawej, alla jusqu’à déclarer, lors d’un débat radio-télévisé à la plénière, que les ordonnances présidentielles avaient été signées «inconsciemment» et qu’il les jugeait «inconstitutionnelles». Ce qui mit le feu aux poudres…
ICI AUSSI TOUT EST CALCULS.
Certes, Charles Nawej revint publiquement sur ses paroles, présentant ses «plus profonds regrets et solliciter le pardon de Son Excellence Monsieur le Président de la République et de tout le peuple congolais suite au grave malentendu né des propos tenus au sein de l’Assemblée nationale», «regrettant sincèrement être à l’origine de cette entame dans notre cohésion nationale et réitérant le pardon de notre nation», déclarant que «rien ni personne ne peut justifier une atteinte à la plus haute instance de notre pays».
Cela ne changea rien. Le mal était fait. Il était profond.
C’est suite à ces problèmes en interne que le Président mit le cap sur l’extérieur, multipliant, sans fausse note, des visites à l’étranger certainement jamais le pays, même sous Mobutu, n’en avait autant enregistrée.
Il s’agissait de rencontrer le plus de partenaires et de nouer des partenariats stratégiques.
Ce sont ces rencontres avec notamment des diplomates américains qui ont aidé à l’apaisement en dépit des guerres sans fin dans la partie orientale du pays.
Reste le CACH, ce regroupement qui adouba le candidat Félix Tshisekedi et le porta au pouvoir.
Pour des raisons à l’heure actuelle inconnues, ce regroupement n’a jamais su se constituer, n’a jamais su se structurer. Ici aussi tout est calculs ?
« Où est passé CACH ? Pourquoi ne s’exprime-t-il pas ou ne s’exprime-t-il pas de façon ordonnée mieux, coordonnée? Était-ce une construction virtuelle mieux, un château des cartes? Lui qui compte à sa tête ceux qu’un homme, politologue, connaisseur de la classe politique congolaise, appelait quand la campagne battait son plein – in tempores non suspecto – et quand ça grondait de partout, des «bêtes de scène»», écrit Le Soft International (1453 et 1454 datés lundi 15 avril 2019 et mercredi 24 avril 2019).
«Deux années perdues dans une coalition improductive CACH et FCC», ont reconnu, avec courage, le 27 janvier dernier, des Sénateurs membres de l’Union Sacrée pour la Nation dont certains venus des PPRD-FCC, ce regroupement né de la seule initiative du président Tshisekedi qui marche certes sans néanmoins savoir de quoi demain sera fait.
Ce qui peut et doit être dit est que malgré tout, le déboulonnage du système qui avait été promis, a fonctionné à plein régime même si certains acteurs doivent se couvrir le visage en certains endroits. C’est le lieu d’adouber cet adage : la fin justifie les moyens…
T. MATOTU.