Kadima donne le go de la présidentielle en cognant sur Mgr Nshole
KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1592|LUNdi 04 SEPTEMBRE 2023.
Droit dans ses bottes, Denis Kadima Kazadi a donné le go de la course à la présidentielle congolaise dont le jour j sera le 20 décembre 2023. Vendredi 1er septembre 2023, le président de la Centrale électorale congolaise a prononcé la phrase tant attendue mais aussi tant redoutée par certains : « Je convoque, ce jour, l’électorat pour l’élection du Président de la République ».
Collé-serré avec tous les membres de son bureau et ceux de sa plénière de la centrale électorale congolaise – tous sauf lui vêtus d’un par-dessus bleu assorti au dos chacun de son titre pour s’identifier, signe d’unanimité, le moins que l’on puisse dire – le Président de la Commission Électorale Nationale Indépendante, CÉNI, a, vendredi 1er septembre 2023, déroulé le tapis de la logique à laquelle il croit depuis un début somme tout cafouilleux qu’a marqué sa prise de fonctions.
«Je tiens à rassurer l’opinion publique que les élections générales se tiendront le mercredi 20 décembre 2023», déclare-t-il pour la énième fois dans une salle tout ouïe.
« SANS EFFET ».
Puis de vanter sa ligne adoptée dès le début. « Nous sommes convaincus que ce quatrième cycle électoral va élever le standard en matière électorale et ainsi contribuer à la consolidation de la démocratie et de la paix dans notre cher pays (…) La vision de la CÉNI est celle de devenir une CÉNI de standard mondial qui imprime une culture démocratique pérenne en République Démocratique du Congo. Nous aspirons aussi bien avec humilité qu’avec détermination à être un modèle de gestion électorale qui va inspirer et émuler les équipes qui nous succéderont à la CÉNI ainsi que nos sœurs et frères d’autres pays africains et au-delà ».
Puis, toujours dans son même timbre de voix lancinant, monocorde, comme un peu naïf qui le distingue de tous ses trois prédécesseurs – Abbé Apollinaire Malu Malu Muholongu, le pasteur Ngoy Mulunda Nyanga, Corneille Nangaa Yobeluo – il poursuit : « À ceux qui pensent ou même espèrent que la CÉNI va conduire le processus électoral et plus précisément la gestion et la publication des résultats électoraux dans l’opacité et de manière partisane, se détrompent. La CÉNI ne souscrit pas à cette négativité. Il s’agit d’un procès d’intention qui jusqu’à ce stade du processus, s’est avéré sans fondement. Nous avons donc géré avec professionnalisme et honnêteté la cartographie opérationnelle, la refonte du fichier électoral, la répartition des sièges, ainsi que les candidatures ».
Puis : « L’équipe que je dirige travaille avec intégrité et le fait ainsi par conviction. Nous sommes convaincus que ce quatrième cycle électoral va hausser le standard en matière électorale et ainsi contribuer à la consolidation de la démocratie et de la paix dans notre cher pays».
Sur la même note: «Le fichier électoral est complété ; les candidatures pour les législatives et les communales ont été déposées. Il ne reste plus qu’à recevoir les candidatures pour la présidentielle et tel est notre message aujourd’hui ».
« Sans effet ». Une expression qui traversera l’Histoire et collera à la peau de Denis Kadima Kazadi quoi qu’il en coûte, quoi qu’il advienne de ce processus électoral.
Denis Kadima Kazadi rappelle ce qu’il a plus que jamais en tête : « Des élections crédibles, inclusives, transparentes et apaisées ».
Dans une salle Abbé Malumalu pleine comme un œuf prise d’assaut par les Églises du Réveil, kimbanguiste, musulmane placées au-devant et qui ont adoubé ce processus électoral, boycottée par deux Églises, catholique et kimbanguiste, qui continuent de contester ce président de la CÉNI, face à des représentants des partis politiques et des médias et quatre diplomates étrangers, Denis Kadima Kazadi avait fait lire d’abord par la rapporteuse de son bureau, Mme Patricia Nseya Mulela, la décision portant convocation de l’électorat pour l’élection présidentielle du 20 décembre prise conformément au calendrier électoral rendu public le 26 novembre 2022 avant de délivrer son mot de circonstance – un discours d’environ dix minutes – et de lever la séance peu après une séance de photos de famille.
« Sans effet », a asséné Denis Kadima Kazadi à « ces prophètes de malheur» qu’il a identifiés comme ceux « qui espèrent et affirment à haute voix que la CÉNI sera la cause d’un violent conflit post-électoral qui justifierait une grave instabilité politique et qui conduirait à un changement de régime antidémocratique ».
« Sans effet ». Une expression manifestement appréciée par la salle au point d’en réclamer la reprise, prononcée ces dernières années au Congo dans les Églises ou dans la rue par les croyants quand ils voient alentour un prophète ou un vent de malheur.
NSHOLE COGNÉ.
Nul doute, le président de la Commission Électorale Nationale Indépendante avait à l’esprit le Secrétaire Général de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo, CÉNCO, Mgr Donatien Nshole Babula, chapelain de sa sainteté le Pape François, présenté par Wikipédia comme «une personnalité politique congolaise» qui multiplie ces derniers temps les apparitions dans les médias dans le pays et à l’étranger.
Dans l’une de ces apparitions, le Secrétaire Général de la CÉNCO avait manifesté sa crainte de voir le pays « se perdre » au lendemain du processus électoral en cours.
«Le pays vit de petites crises dont la somme risque d’être néfaste à la fin», argumente-t-il.
Les Évêques catholiques rejoints par les dirigeants de l’Église protestante (l’Église du Christ au Congo) insistent désormais sur une contre-expertise du fichier électoral, l’audit externe réalisé par la CÉNI ne serait pas à leurs yeux « crédible ». «La CÉNI s’est passée de l’audit externe ; elle a collaboré avec des individus avec qui il a collaboré ici et là qui sont en fait ses copains. Elle s’est arrangée un soi-disant audit externe qui est en fait une prolongation de l’audit interne».
Reste le dépôt des candidatures pour la présidentielle qui démarre le 9 septembre. «Un Bureau de Réception et de Traitement des Candidatures, BRTC, sera ouvert à Kinshasa au siège de la CÉNI en date du 9 septembre 2023 », a indiqué le rapporteuse Patricia Nseya, lors de la lecture de la décision de la plénière de la CÉNI. D’ores et déjà, le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo va se présenter à cette présidentielle. Outre qu’il est le candidat des partis et regroupements politiques qui lui sont proches, son parti historique UDPS l’a désigné candidat lors d’un Congrès à Kinshasa.
Vendredi 1er septembre 2023 au sortir de la salle Malu Malu, le professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba a salué «la promesse tenue» par la CÉNI et son président, appelant les parties prenantes congolaises à désormais se rassembler, insistant sur une « élection qui n’a de sens qu’au jour d’après quand elle apporte la paix ».
D. DADEI.