Le Gabon et le Togo très attirés par le Commonwealth
Le CHOGM, le sommet des chefs de gouvernement du Commonwealth s’est ouvert lundi 20 juin à Kigali. Le Gabon et le Togo, deux pays africains francophones, veulent intégrer l’organisation.
C’est dans son discours solennel de nouvel an que le président Ali Bongo Ondimba a fait part de la volonté du Gabon de faire partie de la «grande famille» du Commonwealth.
En avril 2022, c’est au tour de l’assemblée nationale du Togo de voter une résolution pour soutenir le processus de l’adhésion du pays au Commonwealth. Si le Gabon et le Togo sont admis dans l’organisation, ils rejoindront le Rwanda, de tradition francophone, devenu en 2009 le 54ème État membre du Commonwealth. Pourquoi ces pays veulent-ils rejoindre le Commonwealth ? Le ministre togolais des Affaires étrangères, Robert Dussey, a déclaré que l’inclusion du Togo francophone dans le Commonwealth «l’aiderait à développer des liens plus étroits avec les pays anglophones, lui ouvrant ainsi de nouveaux horizons en dehors de la sphère d’influence de la France en Afrique occidentale».
Pour le président gabonais, l’adhésion au Commonwealth constitue «un tournant géopolitique majeur» pour son pays.
Ali Bongo Ondimba explique cette démarche par le désir du Gabon de «s’ouvrir et adhérer à un autre espace multiculturel également porteur ; avec à la clé de nouvelles opportunités pour nos jeunes, pour nos entreprises par l’apport diplomatique et économique que le Gabon pourra en tirer».
UN UNIVERS DE 2 MILLIARDS DE CITOYENS.
En avril 2022, après le vote de l’assemblée nationale togolaise en soutien au processus d’adhésion du pays au Commonwealth, Gerry Taama, député et président national du parti d’opposition Nouvel Engagement Togolais, a expliqué les raisons de son choix par les opportunités économiques et les facilités qu’octroierait le Commonwealth à ses membres. «Les arguments présentés par le gouvernement, je vais en citer trois. Le premier, cette ouverture vers un univers de 2 milliards de citoyens, donc, un marché de 2 milliards qui fait que tous ceux qui sont dans l’entreprenariat au Togo vont s’ouvrir vers ce marché; des facilités de voyage. Comme vous le savez, le Togo a une population très jeune et puis, des facilités de protection puisqu’un Togolais qui aura des difficultés ailleurs dans un pays qui n’a, par exemple, pas des liens diplomatiques avec le Togo, sera de facto protégé par un pays du Commonwealth», explique le parlementaire togolais.
Mais qu’en est-il réellement ? Que peuvent attendre le Gabon et le Togo de leur adhésion au Commonwealth ? Gerry Taama trouve que la demande d’adhésion du Togo s’inscrit dans une logique de diversification de partenaires qui est dans l’air du temps.
«Beaucoup de pays anglophones aussi ont adhéré à la francophonie. Vous avez le Nigéria, vous avez le Ghana. Je pense que ces pays-là ont décidé de diversifier leurs choix de partenariat, de ne pas être exclusivement englués dans des partenariats hérités des indépendances», argumente-t-il.
«Donc, c’est une plus grande ouverture que ce soit sur les questions diplomatiques, économiques et sans aucun doute aussi je pense que sur les questions d’influence. C’est une façon peut-être d’avoir un contrepoids en termes de partenaires sur éventuellement les accords internationaux», conclut Gerry Taama.
En ce qui concerne les avantages que le Gabon obtiendra en adhérant au Commonwealth, l’analyste Mays Mouissi bat en brèche l’argument de la diversification. Il ne pense pas que cette adhésion changera fondamentalement les relations économiques et diplomatiques en termes d’attraction et de diversification des partenaires économiques. «La réalité de la diversification, elle est faite aussi bien aujourd’hui au Gabon sans qu’il n’ait eu besoin d’être dans une organisation comme le Commonwealth», déclare-t-il.
«Le premier partenaire économique du Gabon aujourd’hui c’est la Chine. Ce n’est plus la France. Lorsqu’on regarde des acteurs économiques majeurs, outre la France et la Chine, on trouve des pays qui étaient inexistants il y a quelques années comme l’Inde», ajoute-t-il.
Pour ceux qui attendent des changements économiques majeurs qui découleraient de cette adhésion au Commonwealth, Mays Mouissi affirme que «les changements économiques sont liés aux politiques qui sont menées intrinsèquement à l’intérieur du pays. On peut avoir deux pays du Commonwealth qui vont mener des politiques complètement différentes et ils vont obtenir chacun des résultats totalement différents». A ses yeux, cette adhésion relève plus du symbole qu’autre chose. «Ça envoie un signal que le Gabon, historiquement pays attaché au bloc francophone et à la relation avec la France, tente à se tourner, par ses dirigeants, un peu plus vers les pays dits anglophones et le Commonwealth en est l’un des symboles».
Qu’est-ce que le Commonwealth ? Le Commonwealth moderne, tel qu’on le connaît maintenant, a vu le jour en 1949.
C’est une organisation intergouvernementale créée à la fin de la période coloniale britannique. Les anciens territoires britanniques se sont alors fédérés sous la forme d’une union de pays «libres et égaux». C’est un peu comme l’Organisation Internationale de la Francophonie mais, cette fois, pour les Anglophones. Les cinquante-quatre membres de cette organisation intergouvernementale n’ont aucune obligation les uns envers les autres.
Par contre, ils adhèrent tous à la charte du Commonwealth, qui énonce une série de «valeurs fondatrices» telles que la démocratie, le respect des droits humains, la non-discrimination, la liberté d’expression, ou encore la séparation des pouvoirs. La charte reconnaît les spécificités des «petits États» et des «États vulnérables», qu’il convient d’aider, d’assister dans leur développement et de soutenir en cas de danger.
avec AGENCES.